Un peu fatiguée

Publié le par danilo casti

Rabia Louane Belgsir - 44 ans

Où sommes-nous ici ?
Dans la pouponière de l’association Bab El Kheir. Comme vous le voyez, nous sommes dans des locaux tous neufs, constuits dans l’enceinte de l’hôpital général de Beni-Mellal. Il y a ici 24 enfants de 0 à 12 mois. La majorité sont des garçons. Je vous expliquerai ensuite pourquoi. Il y a également 6 bébés handicapés. Des polyhandicaps légers ou plus profonds. C’est le maximum que nous pouvons assurer. Nous accueillons des nourrissons en « abandon direct », c’est à dire des mamans qui viennent déposer ici leur bébé. Nous avons aussi des placements effectués par le procureur, à la suite d’une décision de justice. Tous les bébés sont en principe adoptables. Je dis en principe parce que pour les bébés handicapés, ce n’est pas évident de trouver des familles. Je vous disais à l’instant que je vous expliquerai pourquoi plus de garçons que de filles : parce que les filles trouvent plus facilement de famillles adoptives que les garçons. Il y a sans doute des tas de bonnes et de mauvaises raisons à cet état de fait. Je préfère ne pas en parler parce que cela nous entraînerait trop loin. La réalité est que ici, il y a beaucoup plus de garçons dans ces berceaux.

Quel est votre travail ?
Si vous parlez de fonction : je suis présidente de l’association et à ce titre responsable, entre autres, de la bonne tenue de cette maison. Quant au travail, je fais le ménage, la standardiste, la nounou… tout ce qu’il faut faire dans une maison comme celle-ci. Je n’en tire ni gloire, ni demande de compassion. C’est ainsi. Je fais aussi quelque chose de beaucoup plus difficile. J’essaye parfois de convaincre, à la demande souvent du procureur, une maman de ne pas abandoner son bébé. Dans l’absolu, c’est évidemment la meilleure solution. Dans la pratique, pas forcèmeent. Un bébé a besoin – outre de l’amour bien entendu – de choses matérielles que souvent une maman en grande difficulté ne peut lui donner. La solution de l’abandon peut alors être une chance pour ce bébé. Je sais d’expérience que ce n’est pas facile de choisir d’abandonner son enfant. Il ne s’agit pas là de mères dénaturées, mais la vie qui fait qu’elles sont contraintes à cette décision.

Et quant à l’adoption, comment cela se passe-t-il ?
Bien dans l’ensemble. Grâce aux liens que nous avons tissés avec des associations européennes animées par des MRE, nous avons maintenant des fenêtres qui s’ouvrent un peu plus largement pour nos bébés. Bien sûr, il y a la question qu’on évoquait tout à l’heure. Il y a aussi des contraintes juridiques, que je trouve dépassées mais c’est comme ça. Une famille adoptive peut aujourd’hui ne pas avoir la nationalité marocaine, c’est déjà un grand changement, il faut par contre que les parents soient musulmans. Sans commentaire.

Publié dans portrait marocain

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